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Les pardons en Bretagne

La lecture d’un récent article paru dans Ouest France sur les Pardons en Bretagne a attisé ma curiosité. Nos connaissances de druidisant m’ont permis de voir ces manifestations d’un œil différent de celui du commun des mortels. Je me suis un peu documentée sur le sujet et je vous livre ici le résultat de ma recherche et le fruit de ma réflexion.

Je vous laisse tout d’abord prendre connaissance de l’article :

https://www.ouest-france.fr/bretagne/bretagne-pourquoi-les-pardons-ont-resiste-6480254

J’ai trouvé que le Pardon présentait des similitudes avec nos pratiques de druidisant, mais est-ce si étonnant ?!

D’abord le Pardon c’est quoi exactement ? Voici différentes définitions que je vous livre telles quelles :
• une fête qui se tient à date fixe en un lieu consacré pour honorer et prier le saint patron du lieu et l’un des fondements de la vie religieuse et sociale des Bretons.
• la particularité du Pardon est de participer à une double culture, chrétienne et celtique, de se rattacher à un espace, la paroisse, et à un temps, la fête du saint, qui s’enracinent dans un passé à la fois mythique et historique.
• c’ est une forme de pèlerinage principalement rencontrée en Bretagne. Un Pardon est organisé à une date fixe récurrente, dans un lieu déterminé et est dédié à un saint précis.

Donc, le Pardon est attaché à une chapelle et à son saint, et la cérémonie se déroule à date fixe. Les adeptes du Pardon vouent donc une attirance toute particulière pour les vieilles pierres, tout comme nous ! La célébration à date fixe ne permettrait-elle pas de se caler sur des dispositions astronomiques particulières comme nous le faisons pour nos rituélies avec notre festiaire ?

Parmi les différentes informations s’agissant des Pardons, j’ai trouvé celle-ci particulièrement intéressante. J’ai souligné ce qui montre sans conteste l’origine paienne et druidique de cette tradition :
« La Bretagne est le pays des Pardons. Depuis des temps immémoriaux, chaque année les hommes se rassemblent autour des six mille chapelles qui maillent le paysage et la culture de la Bretagne. Défiant les modes, ils y célèbrent huit cents saints légendaires dotés de pouvoirs mystérieux et avec lesquels ils entretiennent des relations bien particulières. Davantage qu’un pèlerinage, le Pardon breton mélange la fête religieuse et la foire profane. Les Pardonneurs se prêtent à des rites et à des pratiques que l’église a parfois mais en vain tenté d’interdire au cours des derniers siècles : triple circumambulation autour du sanctuaire, baiser des statues et des reliques, ablution aux fontaines, accolement de mégalithes, embrasement de bûchers, offrandes et invocations, chants et danses, jeux… »

Du point de vue historique, si certains voient dans le Pardon une origine celtique, c’est au xve siècle que les Pardons se développent. Le mot « Pardon » provient de l’idée de pénitence permettant de recevoir des indulgences le jour dédié au culte d’un saint. Cette idée de pardon a, au cours de la fin du Moyen Âge, donné son nom à l’événement, qui conserve sa démarche pénitentielle et votive. La création de foires à l’occasion de pardons pouvait être soumise à autorisations au XVe et XVIe siècles du fait de leurs critiques quant à la démarche païenne ou d’ambiance de débauche, dénoncée notamment par le prédicateur Julien Maunoir au XVIIe siècle :
« Ces Pardons, qui consistent en des indulgences que les évêques donnent à ceux qui visitent, aux jours marqués, certaines chapelles ou certaines églises, et récitent certaines prières, sont fort courus en Bretagne. Mais quoique saints dans leur institution, ils étaient devenus, dans ce pays-là, par la corruption du siècle, des espèces de foires pour le négoce, et des rendez-vous de danses et de débauche. De sorte qu’il y avait lieu de douter s’il n’y eût pas mieux valu abolir ces pratiques de dévotion pour en ôter le scandale, que de les tolérer pour entretenir la piété du peuple. »
Au Pardon de Plédéliac, « on va à deux, on revient à trois » dit le dicton.
Le XVIIIe siècle et la période révolutionnaire mettent à mal les Pardons. La piété de la seconde moitié du XIXe siècle multiple les Pardons, chaque fête patronale devenant un Pardon. La ferveur actuelle provient de cette époque. Jusqu’au milieu du XXe siècle, les grands Pardons se déroulaient le jour consacré au saint et non un dimanche proche comme aujourd’hui.
Certains Pardons ont été créés récemment, comme le Pardon islamo-chrétien du Vieux-Marché, créé en 1954 ; d’autres se perdent : de nos jours, certains Pardons ne survivent que sous la forme d’une fête non-chrétienne : une kermesse ou une fête foraine.

Du point de vue pratique, les Pardons ont souvent lieu entre mai et octobre. Ils comportent une messe et une procession en extérieur vers un lieu sacré suivant un parcours déterminé. La procession comprend dans l’ordre : une croix de procession, la bannière du saint du lieu, les croix et bannières des paroisses ou congrégations voisines puis enfin les reliques du saint, entourées par le prêtre responsable de la cérémonie et des autres religieux. La foule accompagne la procession en chantant, en français, latin ou breton.
Le lieu d’arrivée de la procession est immuable. Il est marqué ou non par une construction : calvaire, église, fontaine sacrée, menhir, route… La présence d’une fontaine est extrêmement fréquente. Elle permet aux hommes et aux animaux de se désaltérer, mais l’eau peut être bénie, notamment par immersion temporaire d’une relique, afin d’acquérir des vertus médicinales.
Ce déplacement processionnaire est un aller-retour ou est circulaire (troménie), parfois ponctué de haltes ou de petites processions circulaires autour d’une construction, parfois répétitivement ; d’autres peuvent avoir un parcours en mer.
Ce rituel religieux (les « fêtes de l’âme » comme les décrivait l’écrivain Charles Le Goffic) est généralement accompagné de pratiques et croyances traditionnelles d’inspiration peu orthodoxe (dévotion et médecine populaires, prophylaxie du bétail, tantad – grand feu de joie – , recherches de présages, etc.), de fêtes profanes (boutiques de plein vent, lutte bretonne, débit forain) et ses plaisirs collectifs parmi lesquels, en bonne place, la danse et la musique bretonne.

Il me semble donc évident que le Pardon procède de façon similaire à nos rituélies. La triple circumambulation autour de l’édifice sacralise le lieu. Les messes et la ferveur des fidèles en activent l’architecture énergétique et la dimension spirituelle. La machine se met en route, le lieu dynamisé par les chants et les prières monte son taux vibratoire. La procession avec ses objets rituels et reliques amplifie et entretien l’état vibratoire élevé d’autant qu’elle suit certainement une artère tellurique jalonnée de balises qui manifestent la dimension divine précédemment activée. Les lieux deviennent maintenant propices à la quiétude et à l’état de félicité : les dieux sont honorés. Le moment devient favorable pour demander et obtenir le pardon, l’état de grâce, oublier les désaccords et les situations conflictuelles.
C’est dans ce même état de béatitude que nous « baignons » lors de nos cérémonies, quand les dieux ont répondu à notre appel et nous ont honoré de leur présence.
Il ne reste alors plus qu’à clôturer cet espace-temps magique et privilégié pour revenir au monde profane. Quoi de mieux qu’un moment de partage et de convivialité autour d’un repas pris en commun !